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Zinc à cahuète

Dans mon précédent billet, je parlais d’un restaurant qui avait été racheté et qui souffrait du fait que l’ancien propriétaire y tenait un bar à filles aux moeurs légères, utilisant donc l’établissement de restauration comme une couverture à des activités tapineuses. Le nouveau tenancier ne l’a découvert fortuitement (j’ignore comment) qu’une fois la vente effectuée, et ce passif lui joue des torts quand à la fréquentation qu’il escomptait pour rentrer dans ses frais (de là à dire qu’il rêvait de faire la culbute…).

Et le panneau de la devanture a fortement intrigué ma personne ainsi que la mère de mon fils. Voilà une capture d’écran de ladite devanture justement, enfin juste un morceau choisi :

Bar à pâtes

De bar à pâtes à bar à putes, il n’y a dans le cas qui nous intéresse qu’un plat de nouilles. Ma première computation en est arrivée à la conclusion que le tenancier avait installé ce panneau sur son resto sans penser à mal, uniquement pour faire la promotion du principe du comptoir en salle qui propose une sélection de pâtes pour le repas. D’ailleurs, la partie du panneau qui n’apparaît pas sur ce cliché en indiquait le montant exigé pour une ration : 7 euros.

Oui mais. Car il y a un mais. Point de bar dans le restaurant, juste deux salles, une au rez-de-chaussée, l’autre au premier étage avec un patio en extérieur. D’ailleurs il y a autant de pâtes dans le restaurant que de clients (pour info, 37 couvert en un mois).

Donc ma computation N°2 en déduit que ce panneau était en place au temps du précédent proprio souteneur et qu’il n’a pas bougé de place depuis.

Et c’est là que cela devient passionnant !!!

1/ de l’ésotérisme culinaire au bordel en salade

Charles (je donne ce nom à l’ancien taulier) a mis le panneau « bar à pâtes » pour attirer le client en quête d »une graine et d’un pot à casser (petit rappel, un pot, c’est un cul au temps de Proust, ses fans sur Facebook comme moi doivent en avoir connaissance), si possible dans le même lieu.

Bref, bar à pâtes = bar à putes. Je vais dorénavant faire attention à un tel écriteau chaque fois que le hasard me le fera remarquer sur le porche de quelqu’auberge improbable. « Bar à pâtes » semble donc être le cri de ralliement des consommateurs de sexe payant à la petite semaine, ce qui fait rejoindre à l’enseigne la cohue des signes hermétiques indiquant qu’on peut là tirer son coup, et peut-être même consommer une bière tirée au fût.

2/ de la grossière ignorance crasse à la cime du génie marketing

Bon, Jean-Claude (appelons ainsi le nouveau proprio) achète un faux resto qui s’avère avoir été il y a peu un vrai bar à putes. Rappelle-toi de ma deuxième computation ainsi logique qu’implacable : Jean-Claude n’a pas touché à la façade du bâtiment. Il n’a fait aucun travaux et a conservé tel quel ce fameux panneaux sulfurisant.

Troisième pico computation : Jean-Claude a donc laissé le panneau en place quand il eu connaissance du lourd passif sexuel des murs de la bâtisse qu’il a acquis avec ses économies.

Et c’est là que la compréhension que j’ai de tout cela va vous demander encore un petit effort pour me suivre.

Il n’est plus possible au vu des éléments en ma possession d’acquérir de nouvelles certitudes. Selon moi, il n’y a cependant que deux scénarii crédibles que je m’en vais vous détailler :

Première possibilité : le nul en arithmétique
Le bon JC (il accepterait que je l’appelle JC, j’en suis sûr) n’a pas compris le lourd sens de l’égalité mathématique « bar à pâtes = bar à putes ». Et j’ai du mal à le croire tellement cela me paraît instantanément évident pour moi, ne serait-ce qu’en entrevoyant moins d’une seconde ces trois mots dans le reportage. Donc la bienséance et l’évidence des faits me dictent d’en déduire assurément que JC SAVAIT ses mathématiques.

Donc poursuivons ce raisonnement scientifique ou presque.

Seconde et dernière possibilité : le génie marketing des Carpates
Je vous préviens, je sais que ce qui va suivre est dans doute de la fiction, mais laissez-moi fantasmer et croire en la préscience de l’Homme quant il s’agit de gagner de l’argent.

JC, en gourou de la comm, a tout de suite compris l’avantage qu’il pouvait tirer  du fameux panneau. Il n’a fallu à son indicible matière grise qu’un très court instant pour tracer mentalement l’esquisse du scénario marketing qui amène le prospect à répondre positivement aux trompettes du message commercial et à aboutir à la transformation (on appelle cela dans la jargon un « lead », sexuel mais un lead quand même). Il imagine cet homme râblé, doté d’un cerveau ou pervers ou libidineux ou prédateur ou une étonnante combinaison des trois, perdu dans les environs de ce bourg de campagne, les bourses lourdes pendantes, sympathiser avec ce bougnat dans son champ de patates, et lui demander où est le bar à putes le plus proche pour épancher sa soif de se défaire d’un excédent pondéral situé dans ses testicules. Et le paysan de lui indiquer en toute honnêteté le chemin dudit bar à pâtes.

Bref, JC laisse le panneau en place, pensant qu’il lui ramènerait de la clientèle prête à lâcher quelques euros pour fourrer sa viennoise dans des miches chaudes. J’en connais qui sont emprisonnés pour moins que ça. Sacré JC, quel plat de nouilles tu es d’avoir cru que le trafic généré par cette clientèle trompée sur la marchandise te permettrait de couvrir plus facilement tes frais…

Lecteur, toi qui demain marcheras dans les rues, à Paris, à Melun ou ailleurs, en te rendant à ton travail, si tu croises une restaurant indiquant « bar à tapas », je n’ai pas besoin de te faire un dessin, tu sauras de quoi il en retourne !